Après le voyage cette semaine de Vladimir Poutine à Shanghaï et les 40 accords commerciaux signés entre la Russie et la Chine à cette occasion, le journaliste et ex-député européen Giulietto Chiesa analyse la nature et les impacts stratégiques potentiels de ces tractations qui s’inscrivent dans le contexte de la crise ukrainienne entre l’Europe et les États-Unis d’une part, et la Russie d’autre part, laquelle vient de demander en urgence la réunion du Conseil OTAN-Russie.
Giulietto Chiesa : Impact des accords… par IlFattoQuotidiano
*** Transcription de la vidéo ***
Bonjour à tous,
deux nouvelles importantes à commenter. Je suis de retour à Moscou. La première est un peu mystérieuse, au sujet de la proposition russe faite avant-hier par le ministère des Affaires étrangères pour une réunion urgente du Conseil OTAN-Russie. Une proposition singulière, car en avril, le secrétaire de l’OTAN Rasmussen avait déclaré que les rapports directs entre la Russie et l’OTAN allaient être suspendus.
Poutine a évidemment insisté, vu la gravité de la situation qui dégénère en Ukraine, non seulement dans le Sud-Est, mais dans d’autres régions aussi, après la crise du massacre d’Odessa. À cette situation, l’OTAN a répondu officieusement et partiellement, au sujet du dialogue avec la Russie : un porte-parole de l’OTAN a accepté l’idée d’une réunion, mais seulement après les élections du 25 mai.Les USA et l’Europe veulent avant tout connaître l’issue du vote. Cette information a évidemment disparu des médias occidentaux, vu que la situation n’évolue pas dans la clarté.
L’autre information qui remplit toutes les premières pages est le voyage de Poutine en Chine, à Shanghaï, où sa rencontre avec Xi Shinping est sans précédent dans l’histoire récente. Les journaux parlent ici d’un changement d’orientation du vecteur russe. Poutine veut clairement montrer à tous son changement de priorités. Et en effet, la rencontre de Shanghaï a revêtu une telle dimension économique qu’on peut penser que Moscou a modifié radicalement le sens de ses initiatives en matière de politique étrangère.
En pratique, ce changement du vecteur russe, mais aussi chinois, concerne tous les principaux secteurs, de la production d’énergie, gaz, pétrole, charbon, aux grands travaux, et au système bancaire, ce qui est loin d’être secondaire.
Cela signifie en pratique qu’avec les quelque 40 accords signés, 4 importants gazoducs déjà existants sont réorientés pour acheminer le gaz en 4 points différents de la frontière chinoise, en contournant la Mongolie, soit en dessous, à ouest, soit à est de la Mongolie, depuis Vladivostok, ou Khabarovsk, et toute cette région frontalière avec la Mandchourie.
C’est donc un énorme projet stratégique de redistribution du gaz, lequel, et c’est là un point important, sera acheté par les Chinois à un prix à peine inférieur au prix européen. Les Chinois ont donc changé de position, ils le payaient bien moins cher avant. Les Chinois participeront d’ailleurs activement au financement des gazoducs.
L’engagement est important également côté pétrole, avec l’exportation de pétrole russe vers la Chine, avec la participation chinoise à d’immenses projets : des mines de charbon à ciel ouvert près du Lac Baïkal, l’une de ces mines à ciel ouvert étant de proportions gigantesques. La Chine va acheter massivement son charbon en Australie et aussi en Russie. Et enfin, le projet de grand pont sur le fleuve Amour. La Chine et la Russie construisent le 1er pont sur l’immense fleuve Amour, qui devrait faciliter le passage des marchandises par cette région, puisque jusqu’ici, cela se faisait par bateaux. Il n’y avait pas de pont.
Que déduire de tout ceci ? C’est assez simple : Poutine lance un signal aux Européens. Si l’Europe maintient son allégeance aux États-Unis, et continue à vouloir avoir le contrôle des gazoducs d’Ukraine, alors la Russie vendra son gaz ailleurs. Autrement dit : "on peut se passer de ces gazoducs." Un autre point important, est que dans le cadre de ces accords, il y a une vraie nouveauté, explicite et exposée publiquement : l’échange pétrolier-gazier, et tous les investissements chinois en Russie, et les rapports bancaires se feront sur la base d’échanges en roubles-yuans. Un nouvel avertissement très clair aux États-Unis d’Amérique, et aux marchés occidentaux.
La situation internationale se fait de plus en plus difficile et inquiétante, car ces changements, qui se font en partie sous la contrainte, amèneront des boulversements dont on mesure mal la nature, à brève échéance, mais qui auront un impact stratégique majeur à plus long terme, pour tous les grands protagonistes mondiaux.
Et bonne chance à tous pour ce voyage !
Giulietto Chiesa
Source : Megachip
Traduction : IlfattoQuotidiano.fr
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