Avortements, déformations congénitales, dysfonctionnements du système nerveux. [Tels sont] les effets collatéraux du drame de Fallujah, la cité irakienne dévastée par les bombardements américains en 2004, non seulement par l’usage d’armes interdites, comme le phosphore blanc ou l’uranium appauvri, mais de surcroit par de l’uranium enrichi.
C’est le bouleversant résultat des recherches menées par le professeur Christopher Busby, de l’université d’Ulster, publiée dans « Conflict & Health ». L’analyse des cheveux des parents de nombreux enfants nés avec de graves déformations et déjà porteurs de tumeurs semble démontrer les effets dévastateurs des bombes américaines : une découverte stupéfiante, avec « de multiples implications au niveau global » accusant l’armée à la bannière étoilée d’avoir utilisé pour la destruction de la ville des armes non seulement interdites, mais véritablement inconnues dans la littérature scientifique.
D’ici la fin de l’année 2011, l’armée US quittera l’Irak. Mais l’Irak devra encore se remettre de la lourde hérédité de la guerre. Surtout Fallujah, qui du fait de l’utilisation de ces armes contre la population civile, est aux prises avec [une multitude] de cas d’avortements, de déformations congénitales et de dysfonctionnements du système nerveux. Les chiffres témoignent de manière impressionnante de l’ampleur de la catastrophe sanitaire qui a frappé les enfants : selon les données issues d’un récent rapport du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés , « en 2006, nous avons compté 5928 nouveaux cas de maladies jusque là totalement absentes de Fallujah, dont presque 70% sont des cancers ou des malformations frappant des enfants de moins de 12 ans. » Au cours des premiers six mois de 2007, en revanche, les nouveaux cas se sont montés à 2447, « dont plus de 50% touchent des enfants. » La situation aujourd’hui reste gravissime dans tout le pays, avec un taux de cancers infantiles 14 fois plus élevé en Irak qu’en Égypte.
Une situation que dénoncent depuis le début les médecins locaux, et qui est appuyée depuis des années par les preuves scientifiques issues de nombreuses recherches. La plus récente provient d’une étude épidémiologique réalisée par le Professeur Busby avec l’aide de Malak Hamdan, le président de la Fondation Cancer et Malformations congénitales, et d’Eleonore Blauroch-Busch, responsable du laboratoire allemand qui a effectué les analyses. Avec la collaboration cruciale de deux pédiatres de l’hôpital général de Fallujah, les docteurs Samira Allani et Muhammed Tafash. En plus du sol et de l’eau de la région, ces deux spécialistes ont analysé les cheveux des enfants malades. « Nous avons trouvé des niveaux élevés de plusieurs éléments : calcium, aluminium, strontium, bismuth et mercure » a déclaré Busby : « mais la seule substance que nous avons trouvée et qui pourrait expliquer ce taux élevé de maladies génétiques est l’uranium, un élément radioactif. »
Uranium qui, dans ce cas, n’est pas « appauvri », mais bien « enrichi ». « C’est l’élément utilisé pour les bombes atomiques et dans les réacteurs nucléaires, » rappelle Busby. Un fait totalement anormal, qui a amené les chercheurs à conclure qu’à Fallujah, outre les bombes au phosphore, de nouveaux explosifs qui n’avaient encore jamais été vus, ont été utilisés.
« Ce que nous avons découvert démontre clairement qu’il existe une nouvelle génération d’armes, » a déclaré le professeur.
Mais comment ces scientifiques peuvent-ils être si sûrs que cette forte présence d’uranium est bien due aux attaques de mars 2004 ? « L’uranium ressort par les cheveux, lesquels poussent au rythme d’un centimètre par mois, » explique Busby qui poursuit : « Nous avons obtenu des échantillons de cheveux très longs de certaines femmes, et nous avons mesuré les taux d’uranium sur toute leur longueur. » Un test qui vient confirmer la forte exposition de ces personnes à l’élément radioactif tout particulièrement entre 2004 et 2005. « Mais surtout – insiste le scientifique – cela prouve l’existence de nouvelles armes à l’uranium. » Des engins « qui sont tout à fait effrayants. »
L’équipe de chercheurs mentionne le fait que quelque chose de très semblable s’est produit également au Liban, dans un cratère causé par une bombe israélienne. C’est pour cela, d’après ces chercheurs, que « la nature des armes à l’uranium enrichi utilisée à Fallujah et ailleurs doit rester une question ouverte tant que les militaires israéliens et américains n’auront pas fourni plus d’explications. »
Pour Hamdan, co-auteur de l’étude, « cette découverte stupéfiante devrait faire se réveiller le monde. » On ne peut pas continuer à ignorer les effets de ces armes radioactives sur la population civile, s’exclame un des scientifiques, « des tas de gens innocents sont morts ou mourront dans le futur, sans compter les innombrables parents qui regardent leurs enfants avec horreur et pitié. »